Portraits de famille

Portraits de famille

 

Louis Delmas – Le pasteur évangéliste

Louis DelmasNé le 24 août 1804 à Roquecourbe, un petit village du Tarn, Louis Delmas est le père de Gustave, Emile, Frank, Julien et William

Rapidement, il entre à la Faculté de théologie protestante de Montauban pour y commencer des études de pasteur. Il est d’abord nommé au Temple protestant de La Rochelle le 18 février 1827 en tant qu’adjoint de Louis Viguier, puis devient pasteur en 1829. Trois ans plus tard, Louis Delmas épouse Sophie Chapron, s’installe rue du Temple et développe une intense activité.

Délégué à l’Assemblée de Paris en 1848, président du Consistoire en 1852, député du Synode national en 1872, il prend malgré tout le temps d’écrire de nombreux ouvrages : histoire réformée, thèses, sermons, controverses. Le pasteur Delmas défend aux côtés de plusieurs grandes familles huguenotes, comme les Mörch, une ligne évangélique : le retour au texte de la Bible est vu comme une priorité, là où les libéraux placent l’Homme au coeur de leur réflexion. Distingué par la Légion d’honneur, il quitte ses fonctions de pasteur en 1876 et meurt le 8 janvier 1886 à La Rochelle à l’âge de 81 ans. Sa charge aura été la plus longue qu’ait connue La Rochelle à l’époque contemporaine.


Franck Delmas – Le père de la compagnie

Frank DelmasTroisième fils du pasteur Louis Delmas, Frank est né le 23 novembre 1837 à La Rochelle

Dans les années 1850, il commence à développer le commerce du vin et des eaux de vie, à travers la société vinicole de La Jarrie. Puis, l’arrachage des vignes détruites à cause du phylloxéra l’amène à se lancer dans le transport maritime. Avec son frère Julien, il fonde en 1867 la société Frank Delmas et Cie qui deviendra en 1873 la société Delmas-Frères et dont il sera le président.
Elu conseiller municipal en 1870, Frank Delmas siège dans l’administration provisoire mise en place le 4 septembre lors de la proclamation de la Troisième République. C’est lui qui a la lourde tâche d’administrer la ville au lendemain de la guerre de 1870 avec Edouard Beltrémieux et Arthur Verdier.
Juge au tribunal de commerce, administrateur de la Banque de France, vice-président de la chambre de commerce en 1881, Frank occupe de nombreuses fonctions. Il fait par ailleurs construire la villa Fort-Louis qu’il habitera jusqu’à son décès le 12 janvier 1907.

Julien Delmas – Le co-fondateur

Julien DELMASNé le 31 août 1839 à La Rochelle, Julien Delmas s’associe avec son frère Frank au début des années 1860

Relativement discret, on sait très peu de choses sur lui. En 1883, il investit dans les navires assurant la liaison entre La Rochelle et les îles. Au-delà du transport maritime, il se lance également dans le tourisme d’affaires à l’occasion d’événements, comme lors de l’accueil à La Rochelle du congrès de l’association française pour l’avancement des sciences en 1882.
Julien décède le 30 novembre 1919. A sa mort, il lègue une partie de sa fortune à plusieurs organismes de bienfaisance, comme la société des régates rochelaises qui alimentera la caisse des veuves de marins, la société de charité des dames protestantes, la ligue nationale contre l’alcoolisme ou encore la société pour la propagation de l’incinération de Paris, à une époque où l’usage de la crémation est plutôt rare.

Emile Delmas – Entre l’Alsace et La Rochelle

Emile DelmasNé le 27 mars 1834 à La Rochelle, Emile est l’un des fils de Louis Delmas et de Sophie Chapron

D’abord élève au lycée de La Rochelle, puis étudiant à la faculté de droit de Poitiers, il termine ses études à Paris et entre à la préfecture de la Seine. En 1860, il épouse à Mulhouse Irma Thierry, nièce du grand industriel alsacien André Koechlin. Emile Delmas s’engage ensuite dans la guerre de 1870 contre l’Allemagne en tant que chef d’une compagnie d’ambulancier puis franc-tireur. Après la perte de l’Alsace, désirant rester français, il décide de revenir dans la ville de son enfance et s’installe à La Rochelle avec sa femme. Il rejoint alors la compagnie fondée par ses deux frères, Frank et Julien, en apportant un soutien financier qui permettra d’ajouter deux navires dont le nom rappelle les provinces de l’Est : l’Alsace-Lorraine et le Belfort. L’armateur fait également adopter la roue de Mulhouse comme emblème de la compagnie, les cheminées noires des navires évoquant le deuil issu de la perte de l’Alsace-Lorraine. A la fin de sa vie, Emile Delmas se fait construire la villa Mulhouse où il passe ses derniers jours. Il meurt le 9 octobre 1898 à l’âge de 64 ans.

Maurice Delmas – La deuxième génération

Maurice_Delmas432x332Né à La Rochelle le 1er septembre 1866, Maurice est le fils de Frank et le frère d’Hélène, laquelle épousera Léonce Vieljeux

Il incarne la deuxième génération de la compagnie.Grand philanthrope, discret et bienfaiteur, il est engagé dans la vie de la cité. Membre de la commission administrative des hospices civils, il exerce aussi à titre bénévole, les fonctions de directeur des parcs et promenades publics de la Ville pendant près de dix ans de 1920 à 1930. En 1907 à la mort de son père, Maurice Delmas devient président de la compagnie qu’il développe avec son beau-frère Léonce Vieljeux. Après 40 ans de services auprès de la Delmas, il s’éteint à Paris en 1930, des suites d’une opération chirurgicale. A ses obsèques, seul le personnel de la compagnie est autorisé à offrir des fleurs et aucun discours n’est prononcé. Seul, le grand organiste du Temple de l’Oratoire de Paris se fait entendre au temple.

Léonce Vieljeux – De l’armateur au maire résistant

Léonce_Vieljeux432x332Léonce Vieljeux est né le 12 avril 1865 aux Vans en Ardèche dans une famille protestante

Après des études au lycée de Tournon, il entre à l’Ecole militaire de Saint-Cyr. Diplômé en 1888, il est affecté au 123e régiment d’infanterie à La Rochelle. En 1891, Léonce Vieljeux épouse Hélène Delmas, la soeur de Maurice et la fille de Frank. Ils auront trois enfants : Pierre, Christian et Madeleine.

En 1896, il rejoint la compagnie Delmas Frères et lui donne une impulsion décisive. Léonce est un homme qui voyage régulièrement pour affaires ou à titre privé. On le retrouve ainsi dans de luxueux hôtels comme à Saint-Jean-de-Luz à l’été 1907 ou encore à l’hôtel Gonnet et de la Reine à Cannes en 1930. L’armateur se lance également dans la politique.

Conseiller municipal à partir de 1912, il est élu maire de La Rochelle en 1930, réélu en 1935. Le 23 juin 1940 lorsque l’armée allemande entre à La Rochelle, Léonce Vieljeux refuse de hisser le drapeau nazi sur l’hôtel de ville. C’est son premier geste de résistance. Ami du réseau Alliance, il est arrêté le 14 mars 1944 et déporté au camp de Struthof pour avoir favorisé la fuite de deux ouvriers de ses chantiers navals recherchés par la Gestapo. Il sera exécuté le 1er septembre 1944 avec son petit-fils, le pasteur Yann Roullet, ses neveux Frank Delmas et Jacques Chapron, et le directeur général des chantiers navals Joseph Camaret.

Pierre Vieljeux – Entre air et mer

Pierre_Vieljeux432x332Né le 10 octobre 1892 à La Rochelle, Pierre est le fils aîné de Léonce Vieljeux et Hélène Delmas

Diplômé de l’Ecole des hautes études commerciales, il s’engage en 1913 dans le 2e régiment de cuirassiers, puis officie dans l’aviation comme pilote de chasse : il obtient en 1917 la médaille militaire et la croix de guerre. Démobilisé, il intègre la Mission française de Londres pour parfaire sa formation maritime et rejoint la compagnie en 1919 à La Rochelle.
Il est aussi un ardent défenseur de la création d’un aérodrome et sera le premier président de l’aéro-club de la Charente-Inférieure en 1933. Administrateur-délégué de la compagnie en 1930 aux côtés de son père, il deviendra directeur de la Société Navale Delmas-Vieljeux (SNDV), puis président de la compagnie en 1944. Il est aussi vice-président de la Baltic and International Maritime Conférence de 1950 à 1964, vice-président du Comité central des armateurs de France ou encore administrateur de la compagnie de cultures de la Côte d’Ivoire de 1948 à 1964. Il s’est aussi illustré à travers des initiatives à caractère social, comme la fondation en juin 1939 de l’Union sociale maritime qu’il préside pendant plus de dix ans ou encore la création au sein de la compagnie du comité d’entraide pendant la Seconde Guerre mondiale. Il démissionne de son mandat de PDG de la compagnie en décembre 1966 et s’éteindra à Paris le 21 avril 1987 à l’âge de 95 ans.

Tristan Vieljeux- Une grande figure de l’armement français

Tristan ViljeuxNé le 10 mars 1924 à La Rochelle, Tristan est le petit-fils de Léonce Vieljeux et le fils de Pierre

En juin 1944, il décide de s’engager dans la 2e division blindée du général Leclerc. A l’issue de la guerre, diplômé des Sciences politiques et licencié en droit, il débute une carrière maritime dans la compagnie Fraissinet, puis entre en 1947 dans l’entreprise familiale. Il gravit très vite les échelons et à l’âge de 29 ans, il devient secrétaire général de la compagnie. En 1964, il est nommé PDG de la SNDV, puis deux ans plus tard PDG de la compagnie, poste qu’il occupera jusqu’en 1991.

Tristan va faire de la compagnie le numéro un du transport entre l’Europe et l’Afrique. Il se liera d’amitié avec plusieurs chefs d’Etat africains et sera nommé commandeur de l’ordre national de la Côte d’Ivoire, du Gabon et du Sénégal, d’où son surnom de Tristan l’Africain. Il sera par ailleurs président du Comité central des armateurs de France de 1972 à 1976.

Dans les années 1980, Tristan ouvre d’autres horizons à la compagnie : océan indien, Asie-Afrique et Méditerranée-Caraïbes. Mais attaqué à l’intérieur même de son entreprise, il doit céder les actions de son Groupe à Vincent Bolloré en 1991. On le retrouve auprès de Jacques Saadé, le fondateur de la compagnie maritime d’affrètement (CMA). Tristan Vieljeux entrera au Conseil d’administration de CMA-CGM en 1999 et y restera jusqu’en 2012.